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Histoire

Je ne sais pas vraiment quand je suis née. Ou plutôt je ne veux pas le savoir. A vrai dire les premières années de ma vie ne compte pas pour moi. J'étais encore une Jonah, fille d'un inconnu et d'une junkie. Mais tout ça c'est fini maintenant, à vrai dire je n'en ai même pas le moindre souvenir. Il faut dire que je n'avais que 3 ans lorsque je suis devenue une Petrova. Les papiers ont été signés un 18 décembre, ça je m'en souviens bien. C'est à cette date qu'on fête mon anniversaire, la date de ma renaissance.

Dès mon arrivée dans ce nouveau foyer on a commencé à m'aimer et ça ne s'est jamais arrêté. Les Petrova sont une grande famille russe respectée et riche; pourtant nous n'avions rien à voir avec ces familles que nous croisions lors de grandes soirées pompeuses et ennuyeuses. Ils avaient tous l'air faux et pincé dans leurs beaux costumes chics et leurs jolies robes, maris et femmes se montrant à tous bras-dessus bras-dessous mais sans jamais s'accorder le moindre regard tendre. Quand je les voyais tous, tristes et pauvres, sans joie, sans vie, sans amour, je me sentais fière, très fière d'être une Petrova. Parce que moi mes parents s'aiment. Ils ont voulu adopter car ma mère ne peut avoir d'enfants. Et ils m'ont choisie car ils étaient certainement les seuls capable de me donner tout l'amour dont j'avais alors besoin.

Je suis fille unique bien entendu. Ma mère est une pianiste réputée, mon père est riche. Il possède un ranch, un élevage de chien, quelques grands chevaux de sport ainsi que beaucoup d'action mais il ne travaille pas. Il est rentier et je n'ai pas à m'en plaindre. Toujours à la maison, je n'ai jamais manqué de son amour tout comme celui de ma mère qui était aussi très souvent à la maison. Il m'a tout de suite appris la langue des signes qu'il parlait couramment bien qu'étant entendant car sa soeur était sourde. Puis il m'a envoyée dans une école spécialisée. Là j'ai enfin découvert que je n'étais pas seule, que beaucoup d'autres enfants n'entendaient pas les sons, comme moi. C'est alors que ma nouvelle vie a pu commencé.

Et puis les années ont passé et la petite Petrova est devenue grande. J'ai passé quasiment toute ma scolarité dans des établissements pour sourds, avec mon meilleur ami. Il était le fils du gérant du ranch de mon père et nous étions inséparables. Nous avons appris à monter à cheval ensemble, nous avons appris à nager ensemble, bref nous avons tout fait ensemble. Mais petit à petit, en grandissant, un gouffre a commencé à se former entre nous. J'avais rencontré d'autres gens, m'étais fait d'autres amis, m'était tournée vers d'autres univers. Je me suis tournée vers l'équitation classique après avoir débuté sur les petits chevaux du ranch et j'ai tout de suite accroché. Les carrés de dressage m'ont vu défiler sur les meilleurs chevaux et rafler énormément de prix. J'étais douée, très douée même. En même temps, j'avais les meilleurs maîtres et les meilleurs montures alors forcément, je progressais vite. Et puis le temps est arrivé de passer dans les études supérieures. J'ai longtemps hésité. J'aurais pu continuer dans le monde du cheval et des concours mais d'un autre côté, j'avais toujours adoré dessiner, peindre, ... et j'étais très tentée par une filière artistique. Et puis l'idée de passer ma vie dans la tension et le stress de la compétition ne m'enchantait pas. J'ai donc opté pour une école d'art appliqué.

Et c'est là que ça a vraiment dégénéré pour moi. Je ne saurais pas trop dire pourquoi, c'est un tout je pense. Le fait de quitter le cocon familiale, de faire des rencontres pas toujours formidables, le fait d'être dans l'art, entourée de gens un peu torturés ... tout cela en même temps a fait remonté mon propre côté torturé, tous mes doutes, toutes mes questions. J'étais en pleine crise identitaire, fragile. Et certains ont su utiliser ces faiblesses. J'ai eu des mauvaises fréquentations, j'ai fait beaucoup de conneries. Et puis je suis tombée dans la drogue. Combien d'aiguilles se sont plantées dans ma peau pour me faire planer ? Je serais bien incapable de le dire. Et puis c'est une période sombre de ma vie que j'aimerai beaucoup oublier.

Lorsque mes parents se sont rendus compte que je foutais ma vie en l'air, ils ont agit aussitôt. Je me suis retrouvée en cure de désintox. Une vraie connerie. J'avais fait des efforts pourtant, un gros travail sur moi. Mais à peine étais-je ressortie que je revoyais mon dealer pour une dose. Et il s'est foiré. Il a mal dosé, overdose, j'ai failli y rester. Ca a été le déclic. Mes parents ne m'ont pas renvoyée en cure, non, ils m'ont envoyée à la campagne, au ranch. J'ai retrouvé les chevaux, j'ai retrouvé mon ami d'enfance, j'ai retrouvé ma famille, j'ai retrouvé une vie saine. Ca a été la meilleure cure qui soit. Je n'ai plus retouché une seule aiguille depuis. Mais tout n'allait pas parfaitement, pas encore. J'avais besoin d'autre chose.

Il a fallu que je rendes visite à un psychologue pour enfin comprendre. Je voulais retrouver ma mère. Je voulais comprendre d'où je venais, peut être pour mieux savoir qui je suis. J'ai alors commencé mes recherches et j'étais bien décidée à trouver des réponses à mes questions, quoi qu'il en coute.

J'ai rapidement appris que ma mère était morte d'overdose il y a une dizaine d'année. Peu à peu j'ai pu retrouver cette famille perdue et mes pas m'ont conduite jusqu'en Suède. C’est à ce moment là que j’ai engagé Isaac, mon interprète. Depuis je ne m’en sépare pratiquement plus. J’ai eu besoin de lui lorsque j’ai commencé à faire appel au détective Nikolaï Milan pour m’aider à retrouver les traces de ma famille maternelle. Ca a été un jeu d’enfant pour lui puisque mon oncle n’était nul autre que le gérant de l’écurie de la famille Milan.

J’ai alors passé plusieurs mois avec cette famille qui m’était jusqu’alors inconnue. J’ai appris à les connaitre, à les apprécier. Je suis aussi tombée sur un cheval qui m'a tout de suite plu et je l'ai acheté. C'était la première fois que j'avais un cheval à moi, vraiment à moi. Mais maintenant que j'avais retrouvé ma passion pour les chevaux, je la vivais à fond. Mieux encore, j’avais envie de lier mon métier à cette passion. Comment, ça je n’en savais absolument rien mais plus j’y pensais plus cette idée folle apparaissait comme une bonne idée.

C’est Nikolaï Milan qui me parla le premier de Full Horse. Il devait se rendre là où le haras s’était installé pour une enquête et m’a proposé de m’emmener. Nous nous sommes donc envolés pour la Norvège tous les deux, avec Isaac aussi bien sur.

Là-bas j'ai rencontré un autre membre de ma famille : Weed, mon cousin. Il appartenait à une troupe de spectacle équestre, l'idée m'a immédiatement séduite et je n'ai pas mis longtemps à intégrer leurs rangs. Je ne les ai pas quitté depuis et peut-être que je ne les quitterais plus jamais. Je suis plus heureuse que je ne l'ai jamais été auparavant, complètement épanouie. J'ai appris l'anglais et Isaac a malheureusement quitté mon service, je n'avais plus besoin d'aide. Je suis maintenant coach d'élevage et je seconde Eillen dans la gestion de la cavalerie.